Pour les mêmes raisons qui m’ont conduit à être contre le texte « rétention de sûreté », je suis hostile à une modification rapide de la loi Léonetti. On ne doit jamais légiférer sous l’émotion.
D’autant que le sujet est complexe. La preuve, l’extraordinaire variété des législations en Europe. Seuls les Pays Bas et la Belgique ont formellement légalisé l’euthanasie, sous de strictes conditions. Et le Luxembourg s’y engage par l’adoption le 20 février dernier, en première lecture, d’une loi qui va dans le même sens. Elle devrait passer en 2nd lecture avant l’été.
La plupart des autres pays ne connaissent que l’euthanasie passive. C’est le cas chez nous avec cette loi du 22 avril 2005, qui instaure un droit au « laisser mourir ». En Norvège, l’euthanasie passive est autorisée sur demande du patient agonisant ou de ses proches, si la personne ne peut communiquer. Au Danemark, depuis fin 1992, les malades peuvent faire un « testament médical » que les médecins doivent respecter. En Allemagne, en Autriche et en Espagne, la jurisprudence admet l’euthanasie passive lorsque le patient en a clairement exprimé le désir.
Enfin, en Suède, une assistance médicale au suicide est possible. Et en Suisse, le suicide assisté est autorisé : un médecin peut fournir à une personne incurable et qui désire mettre fin à ses jours, une dose mortelle d’un médicament qu’elle prendra elle-même.
En Belgique, pays 6 fois moins peuplé que le nôtre, 40 personnes sont mortes par euthanasie l’année dernière. Presqu’une par semaine. Cher Jean-Jacques, l’idée qu’il ne faut pas légiférer sous le coup de l’émotion est essentielle dans une démocratie apaisée. Il n’est cependant pas possible de s’extraire du monde dans lequel nous vivons et dans lequel la souffrance et la mort sont notre lot commun à tous.
A moins de promulguer une loi interdisant la mort et la douleur le temps du débat, il faudra que tu m’expliques comme tu comptes t’y prendre pour que le débat se fasse en dehors de cette réalité humaine. Il y aura toujours un cas comme celui de Chantal Sébire ou de Vincent Humbert pour focaliser notre attention et notre émotion. Prétexter l’émotion pour ne pas légiférer, c’est refuser d’affronter une réalité difficile et tourner le dos aux problèmes les plus pressants de notre société. Prendre en compte la réalité, répondre aux problèmes, légiférer, c’est pourtant pour cela que nous élisons des députés. Non?
Il ne faut pas oublier que la loi Léonetti a été adoptée à l’unanimité. N’était ce pas en raison de la pondération dont elle fait preuve?
Il ne faudrait pas ouvrir la boîte à Pandore en donnant l’autorisation au médecin de donner la mort. Beaucoup d’entre eux, semble-t-il, y sont hostiles.
Je n’ai pas aimé l’instrumentalisation du dernier cas même si c’était peut être avec l’accord de la victime. Il y avait là manifestement la volonté de
faire pression sur l’opinion en profitant de l’émotion pour obtenir une modification de la législation. C’est totalement incompatible avec la sérénité nécessaire dans un tel débat. Je n’ai pas non plus aimé cette intervention auprès du Président de la République pour qu’il accorde une dérogation alors que ce n’est pas dans son pouvoir.
Autre élément, apparemment les unités de soin palliatif ne se développent pas vite en France. Il faudrait certainement faire un effort de ce côté.
Je viens d’entendre le débat sur fr3; les choses me parraissent assez claires. La loi léonetti est en fait très mal connue, et les soins palliatifs en deça des besoins.
je vous fait confiance pour pallier les insuffisances. Restons sereins.
Je viens de lire votre post mais attention à ne pas tomber dans le travers de tous les sujets de société: « nous ne devons pas légiférer dans l’urgence ».
Cette phrase, on l’entend à chaque fois que le débat ressurgit. Et à chaque fois, on laisse le temps passer et on oublie de légiférer.
Il est evident qu’il ne faut pas légiférer sous le coup de l’émotion mais il existe plusieurs cas similaires à celui de Chantal Sébire dans le passé récent, il existe une association qui fait un travail remarquable (l’association pour le droit de mourir dans la dignité) et il y a, vous l’avez dit, plusieurs exemples divers au niveau européen.
Donc, passons maintenant après l’émotion et légiferons car sinon on va encore attendre une situation identique…
C’est malheureusement quand on attend que la loi sur les violences faites aux femmes n’arrive pas, que le droit de vote des étrangers aux élections locales attend toujours, que le mariage est depuis peu dans le programme socialiste,…
J’apprécie beaucoup vos engagement monsieur urvoas, je suis meme de votre sensibilité politique, mais la rénovation ne doit pas oublier les questions de société et l’argument du débat à avoir est la preuve que notre monde politique ne se rend pas compte à quel point notre société avance car ces débats la traversent beaucoup plus qu’on ne peut le croire.
Donc je crois fermement qu’il n’y a plus à attendre…
Et comme on m’a appris nous sommes un parti de transformation sociale avant tout…
Je me relis et je me rends compte que j’ai oublié de dire deux trois de ce sujet…
L’euthanasie passive? nous laissons mourir dans des soins paliatifs qui ne font qu’oublier qu’on laisse mourir de faim et de soif un être humain.
L’euthanasie active? on laisse reposer entre les mains du docteur le choix de vie et de mort.
Le suicide assisté? sur avis médical qd à l’incurabilité et à la souffrance, après expertise, on autorise quelqu’un à se suicider proprement. Je trouve que cette solution est sans doute plus humaine…