Le gouvernement a annoncé le maintien temporaire à 65 ans de l’âge de départ sans décote pour les parents de trois enfants s’étant arrêtés au moins une année après la naissance d’un de leurs enfants, ainsi que des parents d’enfants handicapés.
Ces aménagements, limités dans le temps, ne changent hélas rien au caractère profondément injuste pour les Français d’une réforme qui ne garantit pas la pérennité de notre système de retraite.
Le maintien à 65 ans de l’âge de départ sans décote est une exigence pour toutes celles et tous ceux qui ont connu des carrières chaotiques ou précaires, au premier rang desquelles figurent les femmes. Le maintien de cette borne d’âge à titre temporaire pour cinq ans ne concernera que quelques milliers femmes sur cinq classes d’âges, sur les quelques 700 000 personnes qui partent à la retraite chaque année. Cela ne saurait faire oublier que l’immense majorité des femmes et des salariés précaires sont les premières victimes de la réforme annoncée.
Des rustines temporaires sur des mesures injustes ne font pas une réforme juste. La nouvelle journée de manifestation de mardi est donc essentielle.
Le « truc » c’est qu’il faudrait que le PS se décide à proposer un projet CREDIBLE. Sur le plan humain comme sur le plan financier.
Pour le moment, il suffit de lire les propos de M. DE COURSON pour comprendre qu’on en est bien loin.
Pourtant, la « gauche » est capable de proposer un plan sérieux…A condition qu’elle s’en donne la peine. Et qu’elle « cible » les « points faibles » du Gouvernement.
Pourquoi ne pas défendre l’option 3 du COR ? Tout en améliorant celle ci ? Et proposer une réelle politique pour l’emploi ?
Je m’explique. Selon le COR lui-même, il n’y a pas de problème de déficit des caisses de retraite, mais de RECETTES, puisque avec une hausse de 0,37% des cotisations patronales et salariales, on peut financer durablement nos retraites ! Pourquoi ne pas envisager cette solution ?
La France est championne en matière de productivité et la démographie, elle même, nous est assez favorable…Puisqu’en 2008, on comptait 24 actifs équivalents temps plein pour 10 retraités. (En Allemagne, on se situe déjà en dessous de 2 actifs pour un retraité) (Source : union européenne)
Outre l’aveu du COR qu’on peut très bien payer les retraites en travaillant sur l’option 3 – à condition bien sur de ne pas oublier les éléments associés – la Cour des Comptes (M. MIGAUD, confirmera) considère qu’il est faisable de garder l’âge légal à 60 ans puisque nous avons une forte productivité et des indicateurs bien meilleurs que nos partenaires.
Ses calculs montrent qu’il faudrait consacrer 18% de notre PIB au financement des retraites contre 12% actuellement, ce qui n’a rien d’insurmontable. En 2008, les exonérations de cotisations sociales ont atteint 30,7 milliards, soit l’équivalent du déficit prévisionnel de la SECU. Ces exonérations ont pesé à hauteur de 28,5 milliards sur la Sécurité Sociale. Depuis de nombreuses années, la Cour des Comptes est plus que sceptique sur l’efficacité de ces mesures sur l’emploi et la compétitivité des entreprises françaises. Selon ses propres conclusions, ces exonérations ne bénéficieraient qu’aux multinationales et non au PME. Il y a donc effets d’aubaine puisque 99% des entreprises sont des PME !
Le préalable à la mise en oeuvre d’une vraie réforme, c’est que le Parlement ait les coudées franches. Il convient donc de supprimer l’article 1er du projet de loi.
En effet :
-Cet article installe, par la loi un « comité de pilotage des régimes de retraites ».
-Quelle est sa composition ? « des représentants de l’État, des représentants des régimes de retraite légalement obligatoires et des personnalités qualifiées » comme le précise l’alinéa 15.
De toute manière « un décret définit la composition et les modalités d’organisation de ce comité » (alinéa 16).
On voit là la toute puissance du décret sur la loi, puisque le décret ne nécessite pas de débat(1). Et c’est très ironiquement que le Gouvernement va jusqu’à dire que le décret « précise les conditions dans lesquelles sont représentés les régimes dont le nombre de cotisants est inférieur à un seuil qu’il détermine ».
Dit autrement, pour les régimes dont le nombre de cotisants est inférieur à un certain seuil ce sera très dur d’avoir un siège à ce fameux comité de pilotage des retraites…
-Quelles sont les prérogatives de ce comité de pilotage des régimes de retraites ?
C’est au départ une mission de surveillance, car le comité doit « veiller à la pérennité financière des régimes de retraite par répartition ; à l’équité du système de retraite et au maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités » (alinéas 4 à 7).
-Ce comité est d’une totale indépendance…Puisqu’on prétend déjà lui dicter ce qu’il doit, au juste, surveiller ! « le comité suit (…) les conditions dans lesquelles s’effectuent le retour à l’équilibre des régimes de retraite à l’horizon 2018, et la progression du taux d’emploi des seniors pour atteindre à l’horizon 2030 la moyenne des pays de l’Union européenne » (alinéas 8 et 9).
On notera la différence de calendrier : équilibre des régimes de retraite pour 2018, amélioration de l’emploi des séniors pour 2030. Un calendrier qui ne s’inscrit même pas dans la « Stratégie de Lisbonne II » puisque celle ci va jusqu’en 2020. Or, dès 2010, nous savons déjà que l’équilibre en 2018 repose sur un pari bien incertain et qu’avant et après 2018 le système sera de nouveau en « faillite » ! S’ajoute à cela que le Gouvernement met aux calendes grecques l’amélioration de l’emploi…Alors qu’il nous assure que notre pays aura un chômage de 6% en 2018 ! Bref, le crédit du Gouvernement est aussi fort qu’en 2003 quand M. FILLON assurait à la représentation nationale que les comptes sociaux seraient équilibrés, grâce à sa « réforme », jusqu’en 2020 ! Chose confirmée par M. SARKOZY en 2007. Rappelons au passage que M. LECLERC conditionne, dans son rapport, une active politique de l’emploi : quand on voit les résultats actuelles, on voit mal comment le miracle économique aurait lieu ! (Cf Capital le mag)
Chacun sait combien pourtant que l’employabilité des personnes âgées de 50 ans et plus sera un élément capital dès lors que l’âge de la retraite est repoussée de 2 ans pour tout le monde (2). Or ici nous avons affaire à une simple déclaration d’intention avec en prime l’objectif – oh combien ambitieux – de seulement rattraper « la moyenne des pays de l’Union européenne » chose que nous n’avons pas réussi à faire de 2000 à 2010 sous l’égide de la « Stratégie de Lisbonne I » ! (3)
-Les alinéas 13 et 14 sont aussi particulièrement bien construits ! Je passe sur l’échéance du fameux rapport – 31 mars 2018 (4) – et m’intéresse tout de suite au rapport lui même : « le Conseil d’orientation des retraites remet au Gouvernement et au Parlement un rapport faisant le point sur la situation des régimes de retraite ». C’est donc le COR qui est appelé à un rapport. Mais…Le Gouvernement peut le mettre à la poubelle car « le Gouvernement consulte le comité de pilotage des régimes de retraite sur un projet de réforme des régimes destiné à maintenir leur équilibre au-delà de 2020. »
-L’alinéa 17 est encore plus clair : « Le comité de pilotage s’appuie sur les travaux du Conseil d’orientation des retraites ». Oui, vous avez bien lu ! Des technocrates ont prééminence sur les parlementaires du COR ! Bref…Ce ne sont pas les élus qui évalueront la période 2010-2018 mais le comité ! Qui a dit que les parlementaires étaient soucieux de leurs prérogatives ? Rappelez moi, ce n’est pas le « centre » et M. SARKOZY (UMP) qui expliquaient, en 2007, qu’un retour au politique était nécessaire…Face aux « technocrates » ?
(1) Le présent projet de loi est présenté en procédure accélérée, avec une seule « navette » entre l’Assemblée Nationale et le Sénat. Heureusement, cette procédure est censée être réservée aux vraies « urgences » !
(2) L’exception des personnes ayant commencé à travailler à 17 ans ou avant, est quantité négligeable, mathématiquement parlant. On ne peut donc en faire un argument d’ordre politique pour justifier l’inverse.
(3) Je suis prête à parier que jamais dans un texte de loi il n’a déjà été question d’une échéance à 20 ans !
(4) Le cachet de la poste faisant foi ?
-Le plus « amusant » c’est de lire, quelques jours après le vote de la « réforme » et dudit article 1er, l’A.N sortir un rapport d’information sur l’évaluation d’une loi…Qui dit tout le contraire !
« Le choix de ce sujet d’étude (…) s’inscrit dans la pratique indispensable et maintenant bien ancrée, consistant à ce que le Parlement mesure lui-même non seulement l’effectivité de la mise en œuvre des textes qu’il a adoptés, mais également, et au-delà, leurs multiples impacts
: juridiques, économiques, financiers, environnementaux, scientifiques… »
Bref, vos collègues pourraient peut être interroger M. GEST et le Ministre pour savoir pourquoi ce qui est une « pratique indispensable et maintenant bien ancrée » (paraît il) du « Parlement » tout au long des 17 alinéas de l’article 1er du projet de loi est plus que malmenée ? Puisque ceux ci n’ont de cesse de préciser que seul le « comité de pilotage des régimes de retraite » pourra évaluer le bien-fondé de la réforme et faire ses propositions pour l’avenir ? Et que le COR sera négligeable ?
Rajoutons à cela que le Gouvernement a détourné l’esprit de la pénibilité en n’accordant de bonus qu’aux seuls « invalides ». (1) En tout état de cause c’est sur une pente bien savonneuse que le gouvernement se précipite ici, en considérant que seul le travail qui rend infirme est pénible..! Pourtant, la grande « maladie » du siècle s’appelle…Le stress !
Pourquoi vos collègues sénateurs, ne militeraient ils pas pour une semi-individualisation du temps de travail, c’est-à-dire dans un premier temps décider avec les partenaires sociaux à partir de quelles conditions un poste de travail doit être considéré comme pénible ? J’ai déjà en tête le travail de nuit, le travail dans des conditions mesurables de bruit ou de température particulières, le travail posté (2×8, 3×8), et d’autres encore. Le certificat de travail est le document idéal pour comptabiliser dans la carrière du salarié le temps passé en « environnement pénible ». Une règle de calcul permettrait ensuite de bonifier ce temps.
Et dans le même temps, faute de pouvoir accorder des avantages aux « métiers pénibles » – les femmes vivant en moyenne 8 ans de plus que les hommes bénéficient d’un avantage de 30 % (sans compter les réversions). Les cadres vivent 10 ans de plus que les ouvriers. Comment distingue t on les métiers pénibles ? Par le sexe (les hommes se fatiguent davantage), par la catégorie socio-professionnelle (bonjour les corporatismes) ? – pourquoi ne proposeraient ils pas que reviennent à l’employeur de supporter le coût d’un emploi plus pénible qu’un autre, en lui imposant des cotisations plus élevées qui reviendraient directement au salarié concerné sous forme de points ? C’est tout bénéf pour la Sécu, et on mettrait enfin ce fameux « capitalisme humain » dont nous parlait, en 2007, un certain Bayrou ! Une occasion de rappeler aux sénateurs de l’Union Centriste qu’ils se sont plus ou moins fait « modem » au moment de toucher les sous de l’UDF (rappel de la loi « d’ascenseur » en direction du NC)
A défaut de toucher à la borne de 62 ans, vos collègues pourraient plaider pour éviter le recul à 67 ans, car il est injustifié. Tout simplement parce que les « bénéficiaires » de cette mesure sont celles et ceux qui ont eu la carrière la plus pénible.
Pas tant en terme de conditions de travail – encore que – qu’en terme de coupure ou de cassure dans leur carrière. Cette limite est bien celle de la retraite du pauvre, la retraite de celui ou celle qui n’a pas réussi à cotiser assez pour partir avant cet âge, et qui partira en retraite avec le minimum du minimum. Le Gouvernement ne va tout de même nous faire croire que ces personnes-là pourront augmenter leur pension par un « complément retraite » !
Par un étrange retournement de situation, porter le départ « minimum » de 60 à 62 et laisser ce « filet de sécurité » à 65 ans serait avantageux pour la tranche de la population la plus pauvre puisque l’écart de temps de cotisation serait diminué de 2 ans.
Il y a par contre un point qui n’a pas vraiment été évoqué c’est celui des cotisations du régime général. Là-aussi au risque de heurter certaines sensibilités je verrais d’un bon œil la possibilité pour un salarié de moduler son taux de cotisation durant sa carrière. Pourquoi ne pas autoriser à ce que – en fonction de ses possibilités ou de ses envies – il puisse cotiser à hauteur de 120, voire 140%. Non pas pour toucher plus une fois en retraite, mais tout simplement pour partir plus tôt en retraite ? Ainsi, l’effort de solidarité est maintenu…Et on commence à instaurer plus de libertés pour les salariés ! Bref, le PS donnerait, en partie, raison aux « centristes » (et au rapporteur !) sur la retraite à la carte, tout en l’encadrant !
(1) Taux d’invalidité reconnu par la Sécurité Sociale d’au moins 20%
A ces quelques mesures (respectueuses des « points » de M. PREEL), votre groupe pourrait demander – sans empiéter sur les plate bandes du Gouvernement – l’harmonisation européenne, en matière de durée de cotisation : ramener celle ci à trente cinq ans (et non quarante et une)…En contrepartie de l’allongement de l’âge légal du départ en retraite, puisque c’est cette durée de cotisation qu’ont choisi nos partenaires européens : Allemagne, Italie, Espagne, Belgique. Il n’y a rien de « juste » à faire payer les Français(es)…Qui tout au contraire, devraient être encouragé(e)s/récompensé(e)s de leurs efforts sur le plan de la natalité !
Votre groupe pourrait aussi proposer des amendements visant à éviter l’incurie des politiques, histoire que certains fonds « sanctuarisés » ne soient pas « violés » par des « (ir) responsables politiques » soucieux de les utiliser par fainéantise ou urgence électorale ! Rappel : M. SARKOZY, en 2009, prévoyait de sanctuariser le FFR pour le compte souverain français ! Qu’est devenue cette eunième promesse ?