Aujourd’hui débute l’étude d’un projet de loi qui prévoit d’inscrire dans la Constitution le principe d’une loi-cadre de programmation des finances publiques pluriannuelles visant à assurer l’équilibre des comptes.
Ce gouvernement me manque pas d’air puisque depuis 2003, la dette publique a augmenté de 70 % et atteint un record absolu depuis la guerre. Le déficit public a triplé depuis que Nicolas Sarkozy est à l’Elysée (de 2,7 % à 7 % du PIB).
C’est donc une nouvelle opération de communication assez grossière que le chef de l’Etat entame en tentant de faire croire que le texte va poser des règles pour encadrer ses propres dérives.
Appliqué à la lettre, ce principe conduirait à l’asphyxie de l’économie à chaque retournement de conjoncture. A donc été ajouté un alinéa qui prévoit que la loi cadre sera révisable chaque année par les Assemblées. Ce qui revient à changer la Constitution pour faire… la même chose qu’aujourd’hui. Comprenne qui pourra.
Quelques remarques :
-Pour moi, cette communication autour de la règle d’or (à l’allemande) présentée par le Gouvernement, recèle trois objectifs :
*persuader les Français que la droite au pouvoir est meilleure gestionnaire que la gauche
*envoyer un signe aux centristes qui réclament ladite règle depuis (au moins) 2002 et se rabibocher (ainsi) avec l’électorat centriste (déterminant pour le deuxième tour) tenté par DSK ou BAYROU
*donner une nouvelle caution aux marchés financiers, quant à la détermination (juridique) des gouvernants à lutter contre les déficits excessifs, et ainsi conserver le AAA jusqu’en 2013
Bien sur, à l’examen du texte, on ne peut que se récrier quant à la tartufferie gouvernementale (et présidentielle)…Mais sur le plan politicien, ce n’est pas une mauvaise opération.
…Du moins tant que l’opposition – allo le PS ! – ne réagit pas. J’entends par là tant que les parlementaires qui sont en contradiction avec ce texte, ne font pas un boulot semblable à celui qui a été fait pour le bouclier fiscal…Qui (on le rappelle) au départ, se donnait (lui aussi) un objectif fort louable : la justice fiscale.
Ce n’est qu’en creusant un peu, en déterrant les vrais objectifs du texte, en dénonçant les facilités faites à certains, le coût pour les finances publiques…Et l’injustice stupéfiante de ce texte, que le PS a pu démontrer l’aspect nuisible de ce texte. Mais aussi en proposant un programme plus égalitaire, via la fusion de la CSG et de l’IR. (Enfin, le PS a rencontré un fiscaliste !)
-L’autre observation que l’on peut faire sur cette proposition de révision de la Constitution – qui exige donc un Congrès – c’est qu’elle contredit complètement les éléments qui ont permis à M. SARKOZY de devenir Président en 2007.
En 2007, le candidat SARKOZY nous expliquait :
*qu’il serait (en quelque sorte) le patron de l’entreprise France.
*qu’il allait mettre fin à l’impuissance du politique face à des éléments internes (droit) et externes
*qu’il allait redonner au Parlement une place imminente, notamment sur le plan fiscal/économique
*qu’il gererait en bon père de famille le Trésor, en raison de son orientation politique (droite vertueuse contre gauche dépensière)
Or, la vocation première de cette proposition de révision de la Constitution, c’est d’entériner le fait que élus comme gouvernants, sont des gens à tel point dispendieux – toute tendance politique – qu’il s’avère nécessaire de limiter leurs actes mandatés ! (En soi, c’est juste, mais quel aveu !)
C’est donc un constat d’échec. Qui s’applique ici, en premier lieu, à l’équipe gouvernementale – responsable du budget, avec en premier lieu Bercy – mais également à la majorité parlementaire qui a validé chacun des textes qui lui a été soumis, depuis le début de la législature, sans souci aucun pour les finances publiques…Sinon pourquoi inscrire dans la Constitution des règles que l’on pourrait très bien s’appliquer avec un peu d’autodiscipline ?
La vertu budgétaire de la droite – si souvent brandit contre le laxisme dépensier de la gauche – est donc ici balayée par ceux qui s’en prévalaient hier ! Un ménage, une entreprise, fait preuve d’auto discipline. Les serviteurs de l’Etat, en exercice, en sont incapables. Voilà ce que nous dit le texte. Un désaveu complet pour la volonté politique ! Il faut contraindre les élus pour qu’ils soient vertueux…
Autre aveu de ce texte : les gouvernants sont des lâches. Au lieu de prendre des décisions difficiles, au lieu d’agir avec constance, d’avoir une vision sur chaque thématique (sur le long terme) ils préfèrent se réfugier derrière des obligations constitutionnelles…Un peu comme les élus et membres du Gouvernement brandissent Bruxelles et Maastricht pour se défendre devant les électeurs !
On est très loin du N. SARKOZY, qui en 2007, voulait refaire le monde, donner une impulsion, et surtout se présentait comme un candidat courageux. Ainsi, celui qui hier encore, prétendait vouloir ne pas tenir compte des sondages ou du mécontentement populaire, s’exprimant lors des manifestations par ex ou les grèves…Entend t il couvrir les décisions politiques par des obligations juridiques ? Lui qui dénonçait (hier) les contraintes extérieures et intérieures, bloquant l’activisme politique…Nous explique (par ce texte) son échec politique et son adhésion aux dites contraintes !
On notera enfin que ce texte met en cause l’aspect entreprenarial de l’action étatique. J’entends par là que les élus de la majorité actuelle, le Gouvernement en place, comme le Président en exercice, aiment à comparer la France à une entreprise. Sauf qu’aucune entreprise ne met son budget sous la tutelle du droit ! Tous les dirigeants – à commencer par moi – n’ont qu’un but prioritaire : survivre !Et accessoirement faire un profit. (Histoire de ne pas travailler pour rien) Pour ce faire, il n’y a qu’un moyen : investir. Autant dire que si un dirigeant veille à ne pas gaspiller ses recettes et à réduire au possible ses dépenses…Il ne fait pas de la trésorerie de sa société un préalable à tout !
C’est pourquoi une entreprise cherche – régulièrement – des sources de financement. Elle n’a pas peur d’emprunter, si elle sait pouvoir compter sur : (1) une réussite économique, (2) une recapitalisation de sa société à moyen/long terme, (3) un soutien de sa base (ses employés) On observera que le jeu du Capital par excellence – à savoir le Monopoly – voit souvent gagner ceux qui ont pris des risques, en achetant (et tant pis s’ils se retrouvent sans les billets orange ou vert !) alors que ceux qui n’ont fait qu’épargner…Se retrouvent bien mal ! Au point parfois d’être contraint à l’hypothèque ou plus !
Un bon entrepreneur, donc, se doit d’analyser une situation pour réagir à celle ci, profiter des opportunités, garder les cordons de la bourse fermés quand cela s’avère nécessaire, investir sur tels secteurs quand le vent souffle, etc. Il ne peut se contenter d’une loi des finances restrictive ! Les choses étant fluctuantes, il convient qu’il élabore une stratégie qui, sans perdre sa cohérence, demeure souple ! (En s’enlevant tous les leviers…L’Etat ne peut que courir à sa perte !)
Celle mise en oeuvre par l’actuel Gouvernement est fluctuante, mais n’a aucune cohérence. Elle se base sur des coups politiciens, des retournements d’affection (hier le modèle américain, aujourd’hui l’Allemagne comme guest star !) et forcément – toute politique demandant du temps – ne peut apporter qu’interrogation sur le cap donné (où va t on ?), déception et manque de résultats.
Autant dire que le texte proposé marque aussi bien l’incapacité du Gouvernement à manoeuvrer la barque France comme devrait le faire un vrai patron ! Mais plus encore, son aveuglement à comprendre que, outre son comportement bien peu entreprenarial, en se liant les bras, il risque fort peu d’obtenir des résultats satisfaisants ! A ce que je sache, on bouge moins bien lorsqu’on est ficelé que lorsqu’on a les mains libres (non, je ne dirai pas dans quelles circonstances j’ai eu les menottes attachées !)
Quel crédit, du reste…Accorder au Gouvernement en la matière ? Le bouclier fiscal était considéré comme inscrit dans le marbre après l’acceptation par le Conseil Constitutionnel. De toute évidence, le marbre est plutôt du stuc !
La même tartufferie se trouve également dans le dispositif brandit par le Gouvernement. Il semble, en effet que l’essentiel de la règle d’or se trouvera dans la loi organique…Laquelle se change facilement, puisqu’au contraire de la révision de la Constitution, elle ne nécessite pas les 3/5 exigés du Congrès ! Qui peut dire, dès lors, que le reniement du Gouvernement sur le bouclier fiscal ne se retrouvera pas en la matière ? La CADES et la prorogation dont elle a fait récemment l’objet, est là pour en attester ! Même chose, le traité de Maastricht a t il favorisé le redressement de nos comptes publics, en dépit de l’obligation contractuelle qu’il induit ? A l’évidence…Non !
-Pour finir, l’objectif affiché – équilibrer les finances publiques – outre que ce n’est pas un objectif de politique mais d’expert comptable…Ne signifie pas qu’il y aura une utilisation bénéfique des deniers publics. Ni que cela profitera à la France.
Surtout si l’on se réfère à ce qui explique ce soudain intérêt (en fin de mandat…) pour une règle constitutionnelle demandée à corps et à cris par les élus centristes (qui n’hésitent pourtant pas à voter des budgets déficitaires !) : à savoir le Conseil Européen tenu en février 2011.
Que retient on dudit Conseil (Européen) ? Que pour être compétitif, il faut imiter…L’Allemagne. Qui le dit ? Un Allemand ! Faut il s’en étonner ? Alors, que prévoit le champion économique européen pour ses partenaires ? Une imitation. Ni plus ni moins. En clair, tout le monde doit reculer, si ce n’est déjà fait, son âge de la retraite à 67 ans; tout le monde doit inscrire une règle constitutionnelle nationale imposant des budgets en équilibre; tout le monde doit mettre fin à l’indexation des salaires sur les prix; tout le monde doit faire plus de R&D; enfin, tout le monde doit taxer les gains des entreprises de la même façon.
On est donc (là encore) très, très, loin du volontarisme politique ! On est beaucoup plus dans la reproduction d’un modèle (en ce moment, le dada européen c’est l’Allemagne) avec tous les désillusions que l’on est en droit d’attendre. La France n’est pas l’Allemagne. Par conséquent, elle ne saurait avoir une politique semblable ! Cela lui serait même, à bien des égards, préjudiciable.
M. SARKOZY prouve – s’il en était encore besoin – qu’il ne sait pas où il va, puisqu’il change de cap, en fonction de désidératas non fondés sur une vision, mais bien sur une recherche de l’imitation à tout prix. Bref, l’actuel locataire de l’Elysée est un bon caméléon : il prend les couleurs centristes, du FN, de la gauche…Mais n’en partagent (au fond) aucune. Il n’a pas d’idée qu’il ne copie. Et c’est cela qui est la cause de ses soucis : car lorsqu’on ignore où l’on va…On ne peut éviter les récifs.
Un bémol toutefois : nous sommes d’accord, le déficit a augmenté. Mais que le PS ait la bonté de ne pas se la jouer trop hypocrite non plus :
-les collectivités territoriales (conduites par la gauche majoritairement) ne sont pas des gestionnaires hors pairs des deniers publics. Question impôts et dépenses (ne relevant pas de leurs attributions), il y a des hausses qui ne sont pas toujours très justifiables.
-le PS a voté en faveur de l’aide (non utile) aux banques, aide qui (au passage) nous plombe…Et explique l’attitude scandaleuse des agences de notation.
-le PS a voté en faveur des guerres, qui nous coûtent certes bonbon…Mais bon, si c’est le prix de la Liberté, pourquoi pas. J’aurai été beaucoup plus sensible à l’argument, M. URVOAS, si vous aviez souligné le caractère « chaise musicale » des dites guerres. On va se battre au nom de la Liberté en Libye…Mais on laisse le Yemen génocider sa population ? Cohérence ? On s’insurge à l’ONU contre un Gouvernement autoritaire…Mais on laisse les autres régimes autoritaires qui l’entourent tranquilles, et même ont les acceuillent à Paris où ils louent/achètent des maisons secondaires !
Pour moi, ce n’est pas le déficit, sa progression, qui est à craindre. Ce serait plutôt du coté des élus – parlementaires notamment – que le mal viendrait. Lesquels ne comprennent toujours pas – ou ne veulent pas comprendre – qu’ils sont là pour faire un travail sérieux, non pour jouer dans la nouvelle émission de télé réalité de M6.
Au lieu de donner des coups de hache (à droite) ou de changer la fiscalité tous les trois jours (à gauche) – ce qui dans un cas comme dans l’autre est nuisible pour le pays : les Français (et les investisseurs) n’aimant rien tant (à raison) que la stabilité – il vaudrait mieux faire ce qu’aucun élu ne se décide à faire depuis des années : lutter contre les G.A.S.P.I.L.L.A.G.E.S.
Rien que çà, sans toucher aux dépenses ou aux recettes, cela permettrait de faire de sacrées économies…Et donc de baisser déficit ou pression extérieure.
Je donne deux ex simples…Et soyons bons, non « démagogiques » :
-supprimer le Sénat…Bon, c’est bon je plaisante ! Je sais bien que le PS, même au pouvoir, n’a jamais une seule fois songé à mettre fin à la Chambre des Anciens
-rétablir la royauté : et oui, un roi coûte moins cher qu’une République à entretenir ! Bon, après, politiquement…Cela risque d’être difficile à faire comprendre ! Et puis surtout, si les Français sont, dans leur coeur, assez pour…Il y aura toujours (les politiciens peuvent remercier Robespierre) une rupture trop grande pour qu’elle soit un jour comblée.
Trève de plaisanterie :
-respecter…Les traités. Je sais, c’est tout bête, mais vu le nombre de condamnations de la France pour non respect de nos engagements, on peut s’attendre – avec un peu plus d’intérêt des élus pour leur mandat – à quelques économies d’importance !
-respecter…Le projet. Et oui, je sais, encore une chose extrêmement dure pour les élus : tenir leurs promesses de campagne.
Pourquoi n’essayerait on pas, pour changer ? Le PS propose un projet pour la mandature, il voit ses membres élus. En tout et pour tout, le PS dispose, pour la mandature, du montant du projet qu’il s’est fixé. Pas un euro de plus. Sur qu’avec une telle « contrainte » les promesses seraient mieux tenues, et surtout les programmes moins foireux !
Et puisqu’il faut toujours la carotte et pas seulement le bâton…Et bien chaque élu ayant réussi à donner à la France une loi qui fonctionne gagne 10 000 euros. C’est beaucoup certes, mais les élus étant tellement peu sérieux, dans l’exercice législatif, qu’une petite récompense saurait peut être les attirer !