Le ministre des relations avec le Parlement, Alain Vidalies a annoncé hier que le 1er et le 2 octobre (ou le 8 et le 9) l’Assemblée nationale étudiera le texte sur la ratification du « traité budgétaire européen« .
Le 13 août dernier, Marie-France Garaud, ancienne député européen a publié une tribune sur ce sujet dans Libération, stigmatisant « les Ponce Pilate du Conseil Constitutionnel ». La sévérité de ses mots n’avait d’égale que l’approximation de ses affirmations.
Ayant eu l’occasion ici de faire état de mes interrogations sur le contenu de ce traité, j’imagine que je suis exempt de toutes suspicions sur une « eurobéatitude » qui condamnerait mes éventuelles critiques. D’ailleurs, le Conseil Constitutionnel ayant maintenant tranché au terme d’un raisonnement d’une extrême sophistication que j’ai aussi ici analysé, le débat peut maintenant porter sur le contenu réel des mesures au regard de la construction européenne.
Et dans ce domaine, M-F Garraud a pris des libertés assez conséquentes avec la réalité d’un traité qui est pourtant très court (16 articles) à lire. Je viens donc de lui répondre aujourd’hui par une tribune dans Libération intitulée « M-F Garaud et sa rapière émoussée« . Comme sa lecture n’est pas disponible à titre gratuit sur le web, je me permets d’en faire figurer le contenu ici.
Vous avez raison M. MOSCOVICI. Le TSCG n’instaure pas l’austérité. Dès règles antérieures le font déjà très bien, via le TFUE :
-L’obligation de réduire d’un vingtième par an la dette supérieure à 60% du PIB est déjà prescrite par l’article 2 du règlement n°1467/97. Cette disposition a été introduite l’an dernier, dans l’indifférence générale, par le règlement n°1177/2011 du 8 novembre 2011 (réforme dite du « Six-Pack »).
-Quant au déficit structurel, il est déjà limité à 1% du PIB.
-Le TFUE prévoit également la limitation du déficit (conjoncturel) à 3% du PIB – cette règle ayant été édictée depuis la ratification du Traité de Maastricht en 1992. Aussi, l’article 3 du règlement n°1467/97 prévoit que les Etats doivent améliorer chaque année lors solde structurel afin de respecter l’OMT défini par la Commission européenne.
-En outre, la réforme du « Six-Pack » (susmentionnée) à mis en place un « Objectif [budgétaire] à moyen terme » (OMT) défini par la Commission européenne pour chaque Etat. En France, cet OMT oblige l’Etat à retrouver l’équilibre structurel de ses comptes publics, soit un déficit structurel limité à 0%.
En d’autres termes, le présente Pacte budgétaire n’implique par de mesures budgétaires plus contraignantes pour la France que celles déjà en vigueur au titre du TFUE.
Dès lors, se pose la question : pour quelles raisons le Gouvernement compte t il soumettre un texte international – et non européen – à l’attention des parlementaires, alors que toutes les règles en place y suffisent ?
Merci d’avance pour votre réponse !
Mr Urvoas, en réponse à votre NB » je n’ai pas repéré de réaction mettant en cause le Conseil Constitutionnel » Pour ma part j’ai repéré au moins une réaction qui met en cause la décision du Conseil Constitutionnel au hasard d’un article publié dans la revue Marianne du 24 août. Il s’agit de l’avis d’Anne Marie Le POURHIET qui est professeur de droit et Vice présidente de l’association française du droit constitutionnel.
Je vous invite à consulter son article sur le lien suivant
http://www.marianne2.fr/Le-Conseil-constitutionnel-invente-la-regle-d-or-non-contraignante_a221662.html
Dommage que vous ne répondiez pas – sur le blog ou par mail perso – à nos commentaires. Votre réponse à « pourquoi s’embêter à faire ratifier au Parlement un traité qui ne change rien à l’existant » ? M’aurait vivement intéressé.
J’ai trouvé un article du point dans lequel vous êtes cité sur ce sujet (lien ci joint). Je trouve cela triste que le gouvernement fasse pression sur les députés afin qu’ils votent pour ce texte qui est inchangé. Les députés devraient être totalement libres de leur vote. Contrairement aux engagements de François Hollande pendant sa campagne, ce traité est identique à la virgule près. Il n’a pas été « renégocié » et il n’a obtenu aucune réelle avancée sur ses propositions (même s’il est vrai qu’elles étaient un peu « floues » dans leur formulation). Il suffit de relire son programme pour s’en rendre compte. Dès lors il serait légitime de consulter les électeurs par référendum. Si François Hollande est sûr que ce traité est satisfaisant, il ne devrait pas avoir peur de consulter les électeurs pour lui donner une pleine légitimité. Il ne faut pas penser que nous ne sommes pas capable de comprendre les enjeux. Pourquoi n’y a t il en Europe qu’Angela Merkel qui a le pouvoir de dire non?
C’est un peu facile d’argumenter que les maigres avancées censées relancer la croissance ne sont qu’un début. C’est le moment ou jamais de mettre la pression sur Angela Merkel. La crise en Europe est telle que si la France refuse de ratifier le traité, elle sera contrainte renégocier le traité. Même si le texte est adopté, la gauche risque de le payer aux prochaines élections.
« Engagement 11
Je proposerai à nos partenaires un pacte de responsabilité, de gouvernance et de croissance pour sortir de la crise et de la spirale d’austérité qui l’aggrave.
Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi, et en réorientant le rôle de la Banque centrale européenne dans cette direction.
Je proposerai de créer des euro-obligations. Je défendrai une association pleine et entière des parlements nationaux et européen à ces décisions.
Cinquante ans après le traité de l’Élysée, je proposerai à notre partenaire l’élaboration d’un nouveau traité franco-allemand »
http://www.lepoint.fr/economie/le-coup-de-pouce-des-sages-francais-a-la-zone-euro-10-08-2012-1494827_28.php
François Hollande n’est pas un homme très courageux. On a pu le voir avec l’affaire du « tweet » où il demandait à son PM (Ayrault) de régler ses problèmes de coeur, au lieu de le faire lui même.
On peut le voir, tout aussi facilement, avec l’affaire du « non cumul des mandats ». Il suffit, manifestement, qu’un sénateur (certes représentant bien « l’intérêt particulier » des sénateurs toute tendance confondue) lui rie au nez pour qu’il la boucle.
Cependant, dans cette affaire du TSCG, M. Hollande fait face à une « majorité » qui ne diffère pas grandement de celle de M. SARKOZY : « courage fuyons ». En témoigne la préférence tenace des parlementaires PS (une majorité apparemment) qui s’apprête à valider un texte non conforme aux engagements pris devant le Peuple Français…Peuple Français dont ladite « majorité » semble oublier, dès les élections passées, que son boulot consiste à faire en sorte qu’ils soient tenus (les engagements) et qu’aucune « solidarité » ne saurait être exigée dès lors que les termes de l’accord (entre le Gouvernement et ladite majorité) sont rompus.
« Je proposerai à nos partenaires un pacte de responsabilité, de gouvernance et de croissance pour sortir de la crise et de la spirale d’austérité qui l’aggrave. »
M. HOLLANDE a bien « proposé » un « pacte de croissance » mais sa visée n’est pas du tout celle ambitionnée. En effet, pour que ce pacte ait la moindre chance de « nous sortir de la crise et de l’austérité qui l’aggrave » il faut qu’il ait une contrainte juridique aussi prégnante que les règles actuelles. Ou bien que ce pacte prime sur lesdites règles…Autrement dit que la « croissance » devienne un « objectif » de l’UE ou une « mission » de la BCE.
La conclusion du Conseil Constitutionnel prouve, sans l’ombre d’un doute, que tel n’est pas le cas. Pour la simple raison que modifier ou enrichir les « missions » de la BCE ou faire valoir la « croissance » comme un « objectif de l’UE » (au même titre que la « concurrence libre et non faussée » par ex) aurait nécessité une révision des traités existants (TFUE) et de la Constitution ! Le joli « pacte de croissance » du Président ne vaut même pas une « loi » ! Et cela, notre hôte, qui connait le droit, ne peut l’ignorer.
« Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi, et en réorientant le rôle de la Banque centrale européenne dans cette direction. »
En français, le terme « rénégocier » signifie « modifier » non ajouter un texte sans valeur aucune, pour faire plaisir aux naifs. Les Français n’ont pas demandé une « Déclaration des droits de l’homme » de l’ONU, très jolie mais sans impact juridique (la violer n’entraine rien de fâcheux) ils ont demandé une DDHC, un texte qui engage et contraint.
Du reste, le Président ne peut feindre de ne pas comprendre, puiqu’il ajoute vouloir « réorienter » le « role » de la « BCE ». Vouloir « réorienter » cela signifie en français « corriger le tir » en donnant un nouveau « role » à la BCE, consistant (à en croire le Président) à veiller à la « croissance ».
Or, on l’a vu plus haut, l’Institution qu’est la BCE, ne voit pas ses « roles » changés. On lui demande UNIQUEMENT de veiller à l’inflation ! Il est dommage que les parlementaires PS ne comprennent pas la différence entre « joli texte » et « texte contraignant juridiquement ». Sans quoi, ils comprendraient que les « prouesses » du Président actuel sont pour le moins dérisoires. Les héritiers de la Révolution devrait pourtant savoir la différence entre « le serment du jeu de paume » (magnifique texte au demeurant) et la DDHC de 1789. Le premier texte est un acte de rebellion contre le roi, en ce que les parlementaires s’autoproclament représentants de la Nation. La DDHC est le texte qui, juridiquement, légitime et valide cette reconnaissance. CQFD.
« Je proposerai de créer des euro-obligations. Je défendrai une association pleine et entière des parlements nationaux et européen à ces décisions. »
Pour le premier point, on ne pas vraiment reprocher à M. HOLLANDE sa « trahison » puisque c’est une décision inconstitutionnelle en Allemagne. On peut seulement lui reprocher de ne pas lire les décisions de la Cour de Karlsruhe à ce sujet !
Sur le deuxième point, M. HOLLANDE est complètement dans son tort, puisque la participation du Parlement dans les décisions européennes, dépend de la Constitution et des « libertés » permises par le Gouvernement. (Non usage du 49,3 par ex ou pas d’usage de la « procédure accélérée »)
En effet, le Parlement allemand, mais aussi néérlandais, italien, anglais, lettonien, irlandais…A voix dans les négociations ! Tel n’est pas le cas des parlementaires Français, qui se contentent du role de « chambre d’enregistrement ». Il est donc parfaitement possible de « faire participer » le Parlement dans tous les actes européens…Mais M. HOLLANDE se garde bien de le faire. Là encore, la chose nous est confirmée par le Conseil Constitutionnel qui, s’il avait vu la moindre lueur d’avancées de ce coté là, aurait exigé une révision constitutionnelle pour enrichir les « compétences » législatives !
S’agissant du PE, M. HOLLANDE n’a rien demandé non plus. Pas même l’élément essentiel et primordial, du mandat parlementaire : « l’initiative ». Ce que chaque Parlement dispose – avec des limites, mais c’est un droit lié au mandat – lui ne l’a pas. Aucune « loi » européenne n’est à « l’initiative » du PE. Il doit demander à la Commission Européenne ou au « Conseil des Ministres » de porter une loi pour lui. Car de « propositions de loi » il n’en existe pas.
Reportez vous quelques siècles en arrière. C’est précisément le rôle qu’on attribuait aux « Etats ». Ceux ci avaient le droit de faire passer des « cahiers de doléances ». Qu’est ce d’autres que fait le PE, sinon porter ses « doléances » ?