Cet après-midi la commission des Lois va débattre d’une proposition de loi déjà adoptée par le Sénat qui vise à supprimer le conseiller territorial.
Ce nouveau type d’élu a été créé par la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités locales. Ce fut d’ailleurs la mesure emblématique d’une loi qui avait pour ambition de simplifier et de clarifier l’organisation territoriale de la République.
La majorité de l’époque voulait diminuer le nombre d’élus et faire baisser le coût de la démocratie locale jugée trop élevée. De fait les 5937 élus concernés (4037 conseillers généraux et les 1800 conseillers régionaux) étaient remplacés par 3493 conseillers territoriaux.
Nous avions alors tenté d’alerter sur le fait que les choses n’étaient pas aussi simples que le prétendait la droite. Ainsi par exemple, la création du conseiller territorial entraînait de fait une augmentation des membres des assemblées régionales (le conseil régional de Bretagne passait de 83 membres à 190). De plus, le conseiller devant siéger à la fois au conseil régional et au conseil général, allait inévitablement se poser la question de l’indemnisation de l’élu.
Mais surtout, le nouvel élu remettait en cause le principe de l’autonomie des collectivités territoriales puisqu’il allait cumuler automatiquement les deux mandats.
Sur la suggestion de Nathalie Appéré, députée de Rennes et rapporteure du texte nous allons donc adopter ce très court texte d’un seul et unique article qui prévoit le rétablissement du système actuel. Ce sera cependant provisoire puisque le gouvernement prépare un projet de loi instituant le conseiller départemental qui sera élu avec un mode de scrutin qui respectera la parité mais aussi l’ancrage territorial.
Est il prévu d’abolir ce qu’à fait le précédent Gouvernement…Pour quelques mois plus tard, le restaurer, comme on le voit avec la « TVA anti sociale » devenue soudain vertueuse ?
Personnellement, je regrette l’abandon de la réforme du conseiller territorial, censé remplacer les conseillers généraux et régionaux. Le problème était évidemment que « la création du conseiller territorial entraînait de fait une augmentation des membres des assemblées régionales » : le conseil régional de Bretagne serait ainsi passé de 83 membres à 190, celui de Midi-Pyrénées de 91 à 251 conseillers, etc. (cf. la loi n°2011-871 du 26 juillet 2011 fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région). Cette inflation dévoyait l’objectif initial de cette réforme. Cette dernière ne corrigeait pas non plus un défaut du système actuel : le nombre exponentiel de vice-présidents. Or, un poste de vice-président ne compte pas dans le cumul politique.
Enfin, il y avait le problème du mode d’élection. Les conseillers régionaux sont élus à la proportionnelle (au scrutin de liste), alors que les conseillers généraux son élus au scrutin majoritaire uninominal. C’est le scrutin majoritaire qui l’aurait emporté, avec ses conséquences notamment en termes de représentativité. Cependant, même si je ne suis pas un partisan du bipartisme, je suis plutôt favorable au scrutin uninominal majoritaire à deux tours car il permet de dégager des majorités politiques claires sans avoir recours à d’obscures alliances de circonstances ; il a aussi pour avantage de pénaliser l’extrême droite. Il permet également de voter pour un homme (ou une femme) et non pour un parti, d’où une plus grande légitimité politique. Enfin, le conseiller territorial aurait eu, comme son nom l’indique, une assise territoriale (le canton). Il représentait donc un territoire et sa population.
Ceci étant dit, il faut aussi regarder du côté de l’intercommunalité où il y a beaucoup à faire. En effet, jusqu’à présent, ajouter à sa panoplie de mandats la fonction de conseiller d’agglomération (par exemple) n’est pas prise en compte dans le cumul. De surcroît, les citoyens ne participent pas (pour l’instant) à la désignation des conseillers intercommunaux (élus par leurs conseils municipaux respectifs). Davantage de parité serait également la bienvenue.
Enfin, selon moi, il est impératif de réformer le mille-feuilles des collectivités territoriales (la superposition des structures et des compétences locales est devenue source de confusion et d’inefficacité) :
- réduire le nombre de communes par 5 ou 10 (suivant respectivement les exemples belge et suédois) ;
- fusionner régions et départements au profit des premiers ;
- assurer une réelle autonomie financière des régions avec un financement régional propre, pérenne et équitable entre les régions (recours à la péréquation si nécessaire) ; dans cette perspective, je ne souhaite pas d’une rétrocession étatique (l’Etat encaisse puis reverse), je récuse toute idée de subvention, je veux que les régions bénéficient d’une manne financière directe ;
- réduire à la fois le nombre de parlementaires de 10 % et leurs avantages spécifiques (dont nombre sont indus)…
En guise de conclusion, j’invite sincèrement à lire le dernier ouvrage du député René Dosière, qui dénonce les folles dépenses des collectivités locales et propose de mettre « L’Etat au régime » (titre de son livre aux éditions Seuil, 180 pages, 14,50 euros). C’est sincèrement un bon investissement. Des réformes qui ne coûteraient rien aux contribuables tout en économisant 15 milliards d’euros !
Las, face aux seigneuries politiques, aux fiefs électoraux, ses idées ont peu de chance d’être prises en compte. Pourtant, le président de la République pourrait forcer la main des barons politiques car il dispose de l’arme ultime : le référendum !