Deux syndicats (CGT et Sud) poursuivent donc leur grève à la SNCF. Ils protestent contre un projet de loi qui viendra en discussion mardi à l’Assemblée.
Ce texte prévoit de remplacer l’architecture actuelle héritée de la réforme de 1997 qui sépare la gestion du matériel roulant, géré par la SNCF de la gestion du réseau, attribuée à RFF.
L’idée essentielle est de répondre aux critères européens en assurant à une nouvelle société baptisée « SNCF Réseau » son indépendance notamment en ce qui concerne l’attribution des sillons, c’est-à-dire la répartition des créneaux de circulation. Parallèlement, il s’agira de rétablir une bonne communication entre « ceux qui font rouler les trains » et ceux « qui entretiennent les voies ».
Sans être un spécialiste, j’avoue ne pas comprendre où est le problème d’autant que le projet de loi ne touche pas au statut des cheminots et ne remet en cause aucune des stipulations conventionnelles et contractuelles régissant les situations des personnels.
Je note enfin que seuls les syndicats UNSA et CFDT ont souhaité rencontré à Paris le rapporteur socialiste (Gilles Savary) proposant ainsi des amendements importants. Et à ma connaissance, une bonne part de ces derniers seront déposés car ils sont de nature à rassurer les personnels : renforcement du statut cheminot, création d’un comité d’entreprise central, mise en place d’un régime d’assurance chômage unique, harmonisation des cadres sociaux des salariés hors statut (contractuels)…
Dans ces conditions, je ne comprends vraiment pas que le mouvement puisse continuer.
La poursuite du mouvement – sous forme de grève ou de discussion avec les élus/le Gouvernement – me semble, pour ma part, tout à fait normal.
-Pour commencer, rappelons que le projet de loi actuel fait suite à une injonction européenne…Comme l’était déjà le projet de loi visant à séparer les entités de la SNCF. Si l’UE s’est trompé en 97, on peut raisonnablement penser qu’elle est encore capable de le faire en 2014. Et si les cheminots avaient raison en 1997, on comprend qu’ils aient légitimement le souhait d’être entendu dans leurs questionnements et critiques, quant à l’avenir de la SNCF (et pas seulement de leur statut et des avantages qui en découlent), leur organisation…A l’image des salariés du privé, qui sont attentifs bien sur à leurs conditions de travail mais aussi (et surtout) au devenir de l’entreprise qui les emploie…Ceci pour éviter que dans quelques années on soit (de nouveau) contraint (par Bruxelles?) de réparer la pseudo réparation d’un acte stupide initial diligenté par UE !
-Ensuite, il faut aussi dire que les cheminots ne sont pas pour le statu quo. Ils sont désireux de voir le système de 97 abattu. Les faire passer pour des privilégiés, incapables de modernisme, c’est ne pas connaître l’entreprise publique. Et, personnellement, çà me fait doucement sourire quand l’attaque vient d’élus sénatoriaux qui, pour rien au monde, ne voudraient voir leur petit confort atteint par le « modernisme » à la suédoise ! Mais passons…
A l’image des Français, les cheminots sont a priori favorable à toute évolution. Pourvue que sa finalité soit réformative (améliore les choses) et qu’on soit en droit de donner du crédit tant aux personnes qui diligentent le nouveau cadre qu’au nouveau cadre lui-même. Qui irait sciemment se faire inoculer le cholera pour éviter la peste ? Le changement oui, mais pas n’importe comment.
Or, que constatent les cheminots ? Que le nouveau cadre de gouvernance proposé vise, non pas à réunir les activités de la SNCF (comme avant 1997) mais à découper encore plus celles-ci en créant trois établissements ! On retrouve donc, en pire, la situation présente ! En gros, on a séparé en deux un système intégré pour le « rassembler » maintenant en trois ! Quel autre terme que foutage de gueule convient ici ? Claquer 20% du CA de la SNCF (coût du désalignement selon les experts du ferroviaire) n’a donc pas suffit ?
-Pour finir sur le meilleur, la dette portée par la SNCF, mais qui résulte de décisions politiques (créations de lignes par ex) n’est pas requalifiée en dette publique. Alors que c’est le cas en Allemagne, ce qui explique que leur réseau s’en sorte mieux que le nôtre. De toute évidence (là encore) on a privilégié la satisfaction de l’UE (bon carnet de note pour Hollande) à l’écoute des préconisations de la Cour des Comptes, qui défendait un tel principe, jugé le plus équitable et le plus efficace économiquement pour le système ferroviaire.
A quoi bon préserver des apparences (statuts, etc) quand le système (ferroviaire) est lui-même menacé ? Les amendements des parlementaires ne changeront guère la donne puisque l’article 40 leur enfreint de prévoir de nouvelles dépenses. La balle est donc du coté du Gouvernement. Qui, s’il veut (dans les années à venir) continuer à se targuer d’avoir de « belles infrastructures » ferait bien de se pencher sur la survie du fret en France, en défendant ses positions…Comme le font TOUS les gouvernants de l’UE (Allemagne en tête), au lieu de constamment privilégié le court terme.
Abuser du droit de grève en cette période d’examens est irresponsable. Le service public que les cheminots prétendent ainsi défendre est en réalité mis en danger s’il n’y a pas de réorganisation et de rationalisation des coûts devant permettre de rembourser la dette qui pèse sur l’entreprise. Les cheminots sont davantage inquiets pour leurs régimes spéciaux de retraite alors qu’un effort est demandé à tous les fonctionnaires pour améliorer les comptes publics.